Rencontre fortuite (PV Rei Ichi)

Messages : 25 Date d'inscription : 01/03/2010 Age : 38

Les tables occupées retentissaient des bruits de cuillères et du blabla incessant de la plèbe. Akira balaya la salle de l'air le plus neutre qui soit. D'ordinaire il prenait son thé chez lui ou à son bureau. De plus il aurait même réservé toute la salle pour lui tout seul. Mais il était là, seul. Comment en était-il arrivé là ?

Le jour avait bien commencé, il avait racheté l'entreprise mourante de fabrique de cookies d'un vieux, en lui faisant croire qu'il faisait ça par charité. Mais il savait pertinemment qu'il n'en était rien. Le coup de l'entreprise familiale, ça allait cinq minutes, ce n'est pas ça qui faisait rentrer de l'argent. Exit donc la petite fabrique de pépé, bonjour la grosse production. Par la suite, il avait eu rendez vous avec un autre investisseur en ville. Manque de chance, sa limousine avait coulé une bielle et il avait les garages en horreur. Alors son chauffeur était partit pour changer les pièces. Et le voilà, tout seul dans cet endroit si ordinaire.

Il s'assit à la seule table encore inoccupée et commanda un thé citron. Il promenait çà et là son regard désabusé...Quelques jolies filles et femmes réveillaient son appétit sexuel...Peut être les inviterait-il. Mais d'abord le thé...

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Rei poussa la porte du salon de thé en verre ornée de l'enseigne de l'établissement, de sa main blanche et longiligne dans un mouvement on-ne-peut plus gracieux. Le bruit de la petite clochette tinta dans la boutique, et par réflexe quelque têtes se tournèrent, avant de retourner à leurs occupations. Elle pénétra donc de son pas feutré dans la petite boutique sous la résonance du carrelage qui ornait le sol, tandis que la porte se fermait doucement derrière elle à l'aide d'un ferme-porte.

Sa longue jupe rouge aux volants blancs lui tombaient avec Candeur sur les genoux, et sa chemise blanche dont les deux premiers boutons étaient ouverts lui donnait un aire désinvolte. Elle tenait sous son bras, comme à son habitude, un roman qu'elle devait certainement être en train de lire. Ses longs cheveux verts lustrés et éclatants lui tombaient sur les épaules, avant d'aller poursuivre leur course frénétique dans le vide, pour arriver à la hauteur de ses hanches.

Elle avait enlevé les mèches qui indisposaient son visage à l'aide d'un bandeau de la même couleur que sa jupe, ce qui ne faisait que ressortir la couleur, certes originale, mais tellement printanière de l'étudiante de dernière année. Elle balaya la pièce de son regard d'or, comme le soleil, pour se rendre compte qu'aucune des tables n'étaient libres.

C'est alors qu'une vendeuse vint à sa rencontre, se rendant compte qu'il n'y avait plus de place pour la nouvelle Cliente. Le magasin devait faire attention à ses dépenses, et en plus d'augmenter le prix, ils ne pouvaient pas se permettre de perdre ne serait-ce que quelques pièces de monnaie.

- Si vous voulez bien me suivre. demanda t-elle, de son ton poli assortit de l'habituel sourire commerciale.

Elle lui proposa de s'assoir à la table d'un homme qui buvait un thé au citron, avec bien entendu l'accord de ce dernier. Il ressemblait à un homme d'affaire, et avait l'air assez âgé. Cependant, cette hypothèse sortit assez rapidement de l'esprit de Rei, en se disant qu'un homme de ce rang ne devait sûrement pas traîner dans un petit salon de thé de banlieue.

- Si jamais cela vous indispose, n'hésitez pas à refuser. dit la nouvelle arrivante, légèrement gênée par cette histoire.

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Le thé était assez correct pour un endroit de cet acabit. Tout en buvant il vît arriver du coin de l'oeil la serveuse en compagnie d'une demoiselle aux cheveux verts clairs.

(Mmh...voilà qui est intéressant...elle est à croquer cette petite...)

Il sourit pleinement quand la serveuse repartit vers son comptoir, laissant la nouvelle arrivante toute gênée, s'excusant presque pour sa présence. Il lui désigna la chaise en face de lui et lui répondit d'une voix neutre, comme assez souvent chez lui.

"Je vous en prie, prenez place. Je ne vais quand même pas vous laisser debout. Une jolie jeune fille comme vous, ce serait un crime..."

Il la regarda s'asseoir et en profita pour la "scanner". C'était une de ses activités favorites qui alliait son sens inné de l'observation avec son expérience des affaires. Le langage corporel, les habits, les accessoires, tout cela parlaient pour les personnes, révélant des caractères particuliers. Elle devait avoir autour de dix huit ans, sa robe et sa chevelure relativement soignée laissait entrevoir une certaine éducation. Le roman à la main, elle avait tout de la parfaite étudiante. Même si pour l'instant il n'aurait sû dire en quoi. Ceci étant dit, il ne pouvait s'empêcher d'entrecouper son raisonnement de pensées plus ou moins perverses, scrutant le triangle de chair qui résultait de l'ouverture des boutons de sa robe. Elle ne devait pas être quelqu'un de complètement prude, elle devait aimer qu'on la remarque...

"Je suis désolé que vous ne soyez pas seule à cette table, mais il se trouve que je suis ici complètement par hasard. J'était dans le quartier pour affaire mais ma limousine est tombée plus ou moins en panne. Alors en attendant que mon chauffeur revienne, je suis entré ici, histoire de passer le temps. J'ai une bonne heure devant moi. Si j'ai bien appris une chose au cours de toutes ces années dans le monde des affaires, c'est qu'il y a bien une chose qui malheureusement ne s'achète pas, c'est le temps. Même si l'on dit que le temps, c'est de l'argent..."

Il avait volontairement évoqué sa limousine, son chauffeur, le monde des affaires, car cela attirait souvent les femmes, surtout les jeunes filles. Il s'essuya le bout des lèvres après une autre gorgée de thé et reprit à l'intention de la jeune fille.

"Permettez moi de vous inviter. Je sais bien qu'être à la table d'un vieil homme bedonnant comme moi ne représente pas le summum du fantasme, aussi permettez que votre petite incursion dans ce salon de thé soit aussi agréable que possible..."

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Rei s'assit donc à la table d'un certain Akira Yamara. Il évoqua sa panne de limousine, d'où la raison de sa venue ici. Il devait être l'homme qui avait racheté la petite fabrique de Cookies à l'autre bout de la rue. C'était une ravissante petite boutique familiale, mais il semblait qu'elle était en faillite. Ainsi donc, il s'agissait d'un riche homme d'affaire. Pour tout dire, cela ne fit ni chaud ni froid à Rei. Elle se fichait un peu du niveau de vie de son interlocuteur, qui su'il soit, mais par politesse elle sourit à l'homme en face d'elle. Elle était une cliente régulière, ainsi elle n'eût même pas besoin de lancer ne serait-ce qu'un regard en direction de la carte.

- Vous avez raison, le temps ne s'achète pas. Qu'est-ce qu'une valeur d'usage de temps, après tout ? La valeur d'usage se définit par sa capacité à satisfaire certains de nos besoins, dont l'argent. Une valeur d'usage est donc une action qui peut servir valablement de moyen à la réalisation d'une fin. Elle n'est pas à distinguer trop rigoureusement du concept de valeur d'échange, sur lequel nous réfléchirons dans la partie suivante, dans la mesure où l'économie du temps ferait gagner de l'argent. Le temps du travail est-il ce temps nécessaire pour jouir d'un temps libre ? Ce que l’on appelle travail peut prendre des caractéristiques très différentes selon les sujets : pour un étudiant, le temps passé en classe est un temps de travail, de même que le temps passé à faire ses devoirs, pour l’employé de bureau, et cætera, diront-nous.

Elle se tut un instant en regardant la serveuse arriver, ses talons faisant un vacarme assourdissant.

- Un thé Sichuan, sil-vous-plait.

Demanda la jeune étudiante à la serveuse, tandis que cette dernière notait sa commande en grattant de son stylo le bloc note, avant de repartir en sens inverse, ses talons claquant dans un léger vacarme. La vendeuse revint avec le même tintamarre que causaient ses chaussures à talons pour venir déposer la tasse de thé devant l'étudiante en congé, avec " les compliments de la maison, et un petit macaron offert avec !". La fine main blanche de Rei vint saisir le sucre et le laissa tomber dans le liquide vert. Si vous goûtez ce thé, vous pourrez remarquer tout d'abord sa feuille noire très fine, assez brillante, voire huileuse, qui est souvent mise en décoration autour de la tasse comme dans le cas présent. En bouche, il paraît très rose, très frais . Une légère note de tabac blanc, puis retour et persistance de la rose, avec une arrivée de notes de lychees et de boisé et de litchi. Un soupçon d'astringence sur la fin...... Un thé complet, exceptionnel, excellent ! Pas étonnant qu'il soit le thé favoris de Rei.

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Il ne fallut pas longtemps à Akira pour se rendre compte que la jeune femme était une habituée des lieux. Cela le confortait dans l'idée qu'elle avait de son caractère. Son petit discours était emprunt d'une certaine classe, il était même surpris de la teneur du fond. Il était rare de voir une fille de son âge philosopher ainsi sur la vie. Ce n'était pas le genre de fille qu'Akira capturait facilement dans ses filets. Tant mieux, cela rendait la proie encore plus intéressante...

Le fait est qu'il ne pouvait pas énormément se concentrer, le bruit environnant, rehaussé par les talons de la serveuse, lui donnant un léger début de migraine. Il allait falloir la jouer fine pour cette fois ci. D'abord parce qu'il ne tiendrait pas très longtemps ici, au milieu de la plèbe, et ensuite puisque de toute façon, son chauffeur allait être de retour dans une grosse demi heure...

Il finit son thé citron et demanda a la serveuse de lui en apporter un autre. Il tendit la monnaie à cette dernière mais les pièces lui échappèrent des mains et roulèrent par terre. Il fit signe à l'employée de ne pas se baisser, qu'il était fautif et s'employa a ramasser les pièces disséminées sur le carrelage. La manoeuvre semblait grossière, mais il ne l'avait vraiment pas fait exprès. Il ne s'attarda pas, malgré un rapide coup d'oeil sur les jambes longues et fines de son interlocutrice et se releva en s'excusant de sa maladresse. Cela n'était pas dans ses habitudes, mais tant pis, autant passer pour quelqu'un de bien...pour l'instant.

"Oui, je comprends votre point de vue...C'est incroyable comme le temps file. J'ai pris de l'âge et toutes ses années derrière moi...On ne peut revivre le passé, j'ai l'impression d'avoir perdu pas mal de temps à errer dans le monde de la finance, j'ai fait tant de projets conjugaux qui se sont envolés, je n'ai accordé d'importance qu'à mon métier, obnubilé par ma vie professionnelle. Je m'en aperçois à présent..." dit-il l'air désabusé et un peu triste, epoussetant la nappe devant lui, même s'il n'en pensait pas un mot.

"Et vous mon enfant, qu'est ce que vous faites dans la vie ? J'imagine que vous êtes étudiante...mais en quoi ?"

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Rei bu une autre gorgée de son thé. Il ne restait à présent plus grande quantité du thé rosée qu'avait commandé l'étudiante. Elle prit de sa fine main blanche aux doigts longiligne le petit macaron jaune qui se trouvait sur le côté de la soucoupe. D'après la petite carte-légende à l'entrée, il s'agissait d'un macaron à l'Ananas. Lorsqu'elle le mit en bouche, elle eût comme une sensation de déjà vu. Le rapide souvenir d'un verre de Jus d'Ananas posé sur une table un chaud et heureux jour d'été. Cette sensation disparu assez rapidement, pour laissez à nouveau place à l'habituel brouhaha qui occupait le petit salon de thé public.

La jeune femme continuait de siroter tranquillement son thé en regardant les passant dans la rue à travers la vitrine. Ils devaient tous avoir une mémoire... Elle chassa rapidement ces pensées de sa tête, et se concentra sur le stand présentoir de la boutique aux couleurs chaudes. Sur des sortes de petites étagères, étaient disposé toute sorte de pâtisseries et de petits gâteaux. Verrine, mousse, Opéra, macaron et autres douceurs se mélangeaient dans un arc-en-ciel de couleurs gourmandes, qui avaient fait s'arrêter plus d'une personne.

Une fois à l'intérieur, c'était pour découvrir moult de petites tables, nappées de dentelle blanche, sur lesquelles reposaient des petites cartes aux couleurs de la pâtisserie. L'étalage de confiseries était rangé en lignes droites derrière une vitrine, tenue par une ravissante vendeuse. Mais ce qui était encore plus ravissant, c'était de regarder tout ces dessert en ne sachant lequel choisir. Rei fût tirée de ses pensées par une question de son interlocuteur.

- Je suis en dernière année au lycée de la ville en section lettres et sciences. Je compte poursuivre avec des études de psychologie. Le programme des première années comme je ne vais pas tarder à l'être est l'étude du stress, de la dépression, des angoisses et phobies, des méthodes de développement personnel, le T. O. C - troubles obsessionnel convulsifs-, et les diverses thérapies des troubles du sommeil.

Dit-elle, sans lui dévoiler les raisons réelle qui la poussaient à faire cela.

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Les mains sur le devant de son torse, les doigts joints. Plus il regardait cette jeune fille, plus certaines choses lui échappaient. C'était la première fois que ça lui arrivait, cela n'était pas normal. Comme si elle n'avait pas de prise avec ce qui l'entourait. Un vide l'empêchait de sonder son esprit, ses manières, comme il le faisait d'ordinaire.

(Voilà qui est peu commun. D'habitude les jeunes filles de son âge sont pleines de vie, elles pensent à des tas de choses, ont des pensées, des attitudes particulières. Elle ne ressemble pas aux autres jeunes. On dirait qu'il lui manque quelque chose...)

Elle étudiait la psychologie, tout ce qui en découlait. Voilà qui corsait encore le tout. Etant du genre manipulateur et fin psychologue, il aurait encore plus du mal a ramener cette fille dans son lit si elle faisait elle même de la psychologie. Voilà qui promettait du challenge.

"Les TOC ? Je connaît ça...Ma mère souffrait d'arythmomanie. Il fallait qu'elle compte, sans arrêt. Des choses insignifiantes, mais tout le temps, tout le temps. Les haricots, le nombre de marches, une fois elle a même compté les ballasts sur la ligne de chemin de fer entre ici et la baie de Tokyo. Je ne doute pas que cela doit être fort intéressant. Mais j'ai comme le pressentiment que vous faites cela dans une autre optique, vous poursuivez un but plus...personnel...je me trompes ?"

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Rei posa délicatement la cuillère d'argent sur la soucoupe de porcelaine, à côté de la tasse vide. Une raison personnelle ? Certes, mais c'était bien plus complexe que cela. Elle voulait, bien entendu, retrouver la mémoire. Les médecin avaient dit qu'il s'agissait d'une sorte d'amnésie poste-traumatique, elle était restée dans le coma pendant quelques temps avant de se réveiller et de venir à l'hôpital. Mais dans son cas, ses souvenirs ne revenaient pas. Cependant, chaque jour qui passait, elle changeait pour devenir comme l'ancienne fille, celle qui avait un nom.

Il s'agissait seulement d'un refus de se souvenir d'un évènement particulièrement traumatisant. Dans ce cas-là, l'esprit de la victime décidait d'oublier. Un rejet de la mémoire. Mais avec ceci, il y avait aussi très souvent un rejet de la personnalité, du caractère, et des loisirs. Ces derniers éléments semblaient plus ou moins être revenue chez la jeune fille, et elle ressemblait partiellement à l'ancienne Rei. Pourtant, être "comme avant" était tout simplement impossible sans se souvenir d'une certaine expérience de la vie. C'était certainement cela sa motivation principale.

Comment était sa vie avant ? Avait-elle des parents ? Un fiancé ? Des amis ? Un travail, peut-être ? Car bien que l'hôpital lui ait donné un age approximatif, ils ne pouvaient le dire à l'année exacte. Et surtout, quel avait été cet évènement traumatisant qui avait détruit le plus beau trésor humain ? Un meurtre ? Un accident ? Un deuil ? Peut-être quelque chose de plus gros encore. Tant de mystères semblaient tourner autour de la personne de Rei, sans que elle-même puisse les éclaircir.

- Plus ou moins. se contenta t-elle de dire, au final.

La serveuse revint avec son tintamarre quasi-insupportable des talons claquetant contre le carrelage pour demander à l'étudiante si elle voulait commander un deuxième thé. Cette dernière accepta avec joie, et jeta un rapide coup d'œil sur sa montre. Il lui restait encore une bonne demi-heure avant de devoir se remettre en route. Nous en revenons au semi-débat de tout à l'heure, l'Homme passait son temps à courir après le temps, et il n'avait plus le temps de prendre son temps, comme disait un certain poème bien connu.

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